Des chercheurs identifient l’origine d’un cancer cérébral mortel

Dr Claudia Kleinman

Dr Nada Jabado

Félicitations à la Dre Nada Jabado, la Dre Claudia Kleinman et leurs collègues pour leur papier publié dans Cell: Histone H3.3G34-Mutant Interneuron Progenitors Co-opt PDGFRA for Gliomagenesis.

Des chercheurs de l’Université McGill espèrent que l’identification de l’origine et d’un gène spécifique nécessaire à la croissance tumorale pourrait mener à de nouvelles thérapies pour traiter un cancer mortel du cerveau qui survient chez les adolescents et les jeunes adultes. La découverte se rapporte à un sous-groupe de glioblastome, une forme rare mais agressive de cancer qui s’avère typiquement mortelle dans les trois premières années. Les résultats sont publiés dans la revue Cell.

Pour compléter leur étude, l’équipe de recherche dirigée à McGill par la Dre Nada Jabado, Professeure de pédiatrie et de génétique humaine et la Dre Claudia Kleinman, Professeure adjointe de génétique humaine, a rassemblé la plus grande collection d’échantillons pour ce sous-groupe de glioblastome et a découvert de nouvelles mutations cancérigènes dans un gène appelé PDGFRA, qui stimule la division cellulaire et la croissance lorsqu’il est activé.

Les chercheurs ont noté que des mutations à ce gène étaient retrouvées chez plus de la moitié des patients au moment du diagnostique et chez la grande majorité de ceux qui ont vu une récidive de leur tumeur. Le niveau d’expression de PDGFRA est d’ailleurs particulièrement élevé dans ce sous-groupe de glioblastome. « Nous avons étudié d’importants ensembles de données publiques d’enfants et de patients adultes en plus de ceux que nous avions générés à partir d’échantillons de patients en laboratoire et sommes arrivés à la même conclusion que PDGFRA a été indûment activé dans ces tumeurs. Cela nous a amenés à soupçonner que cette kinase joue un rôle majeur dans la formation des tumeurs », expliquent deux des co-premiers auteurs de l’étude, la Dre Carol Chen, boursière postdoctorale, et Shriya Deshmukh, candidate au doctorat dans le laboratoire Jabado.

À l’aide d’une ressource « big data » générée par leur équipe à l’aide de nouvelles technologies qui mesurent les niveaux de chaque gène dans des milliers de cellules individuelles, ils ont pu découvrir que cette tumeur cérébrale provient d’un type spécifique de cellules souches neuronales. « Nous avons utilisé des analyses de cellules uniques pour créer un atlas du cerveau en développement sain, identifiant des centaines de types de cellules et leurs caractéristiques », explique Selin Jessa, doctorante au laboratoire Kleinman et co-première auteure de cette étude. « Étant donné que ces tumeurs cérébrales conservent une mémoire, ou une empreinte, de la cellule de laquelle elles proviennent, nous pourrions alors identifier le type de cellule le plus similaire à ces tumeurs dans l’atlas, dans ce cas, les progéniteurs neuronaux inhibiteurs qui apparaissent pendant le développement fœtal ou après la naissance dans des structures spécifiques du cerveau en développement », ajoute la Dre Kleinman qui dirige un laboratoire de recherche computationnelle à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif.

Une découvert inattendue

Les chercheurs notent que le gène PDGFRA n’est généralement pas activé dans cette population de cellules souches neuronales. « En utilisant des technologies de séquençage qui mesurent l’organisation spatiale de l’ADN d’une cellule en 3D », note Djihad Hadjadj, boursier postdoctoral au laboratoire Jabado et co-premier auteur de l’étude, « nous avons constaté que, de façon extraordinaire dans cette cellule souche neuronale, l’ADN a une structure unique en 3D qui permet au gène PDGFRA de s’activer là où il ne devrait pas l’être, conduisant finalement au cancer.»

Mais la découverte est également importante pour classer correctement la tumeur. « Auparavant, ce type de tumeur était classé comme un « gliome », parce qu’au microscope, il ressemble à des cellules gliales, l’un des principaux types de cellules du cerveau », explique Dre Jabado, qui détient une CRC de niveau 1 en oncologie pédiatrique en plus d’être clinicien-chercheur à l’Hôpital de Montréal pour enfants et de diriger un laboratoire de recherche axé sur l’étude des tumeurs cérébrales à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill. « Notre travail révèle qu’il s’agit d’un cas d’erreur d’identité. Ces tumeurs apparaissent en fait dans une cellule neuronale, et non dans une cellule gliale.»

De l’espoir pour un potentiel traitement

PDGFRA peut être ciblé par des médicaments qui inhibent son activité, et il existe en fait, des médicaments déjà approuvés qui le ciblent pour d’autres cancers dont les mutations dans ce gène sont responsables, tels que les tumeurs stromales gastro-intestinales. Ceci offre de l’espoir pour les travaux visant à trouver des thérapies ciblées pour ce groupe de tumeurs cérébrales mortelles, notent les chercheurs.

Les études combinées du génome, y compris au niveau d’une seule cellule et de l’architecture génomique en 3D de la tumeur comparées au cerveau en développement normal, ont été cruciales dans cette étude. Elles ont aidé à identifier les moments spécifiques pendant le développement où la cellule est vulnérable à l’événement cancéreux dans ces « gliomes », qui se sont révélés être des tumeurs neuronales. Fait important, les auteurs démêlent les événements génétiques qui pourraient conduire à une thérapie ciblée dans un cancer mortel. « Nos résultats donnent l’espoir d’améliorer les soins dans un proche avenir pour cette entité tumorale, car ces vulnérabilités extraordinaires peuvent mettre en évidence des traitements qui attaqueraient préférentiellement les « mauvaises » cellules », affirment les Drs Jabado et Kleinman, qui ont uni leurs efforts dans la lutte contre les tumeurs cérébrales mortelles. « Un coup d’arrêt au développement est à l’origine de bon nombre de ces cancers. La même stratégie s’avérera importante pour démêler l’origine, identifier et exploiter des vulnérabilités spécifiques et orienter les stratégies futures de détection plus précoce pour d’autres entités tumorales cérébrales touchant les enfants et les jeunes adultes.»

À propos de l’étude

Cette étude a été rendue possible en grande partie grâce à l’appui du projet LSARP de Génome Canada « S’attaquer au cancer du cerveau chez les enfants à la racine pour améliorer la survie et la qualité de vie », qui comprend le financement de Génome Canada, Génome Québec, des IRSC et d’autres sources, ainsi que de la Fondation Charles-Bruneau et des National Institutes of Health.

“Histone H3.3G34-Mutant Interneuron Progenitors Co-opt PDGFRA for Gliomagenesis” by C. Chen, S. Deshmukh, S. Jessa, D. Hadjadj, C. Kleinman, N. Jabado, et al, was published in the journal Cell on December 10, 2020. DOI: https://doi.org/10.1016/j.cell.2020.11.012

Source : le Bulletel de la Faculté de médecine et des sciences de la santé, voir leur article ici.

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